La technologie ne cesse d’évoluer et on se demande même parfois si elle ne progresse pas plus rapidement que les individus pour laquelle elle a été destinée. L’utilisation de plus en plus convaincante de l’informatique change progressivement la façon dont nous opérons et, parallèlement, change la façon dont nous pratiquons maintenant et certainement celle dont nous pratiquerons dans 10 ans. La question reste à savoir si, en tant qu’individus, nous sommes prêts à sauter dans ce train ultra rapide qui demande une ouverture d’esprit ainsi qu’un changement de vision. Se coller à la technologie demande souvent d’accepter de sortir de notre zone de confort et d’intégrer de nouveaux processus. Soyons honnêtes et avouons que pour la plupart des praticiens, il s’agit d’un défi de taille.
L’utilisation du CAD-CAM a fait couler beaucoup d’encre dans la dernière décennie, entre autres dans le domaine de la confection des guides chirurgicaux. Il est incroyable de penser qu’à partir de diverses numérisations, nous en arrivons à produire ces guides d’une précision remarquable qui, au final, permettent au patient d’obtenir des résultats optimaux. Voilà une pratique que l’on considère maintenant courante. La technologie est acquise, et les habitudes des praticiens aussi. Dossier clos. Mais qu’en est-il de l’utilisation du CADCAM en denturologie, et plus particulièrement en prothèse partielle amovible (PPA), qui fait partie de votre quotidien? Pouvez-vous imaginer une pratique avec un minimum d’empreintes? Une pratique où l’alginate n’existe plus? Ce n’est pas de la science-fiction, mais bien une façon de pratiquer que certains dentistes et denturologistes ont intégrée dans leur pratique. D’ici 10 ans, cette pratique sera inévitable dans vos cliniques…
Lorsque l’on parle de CAD-CAM, trois étapes majeures sont considérées : l’acquisition, le design et la fabrication.
Comme vous le savez de par votre pratique quotidienne de la denturologie, la majorité des actes posés sont demeurés de nature artisanale; raison pour laquelle, à la base, on parlait d’art dentaire et non de médecine dentaire. Il s’agissait d’un art, puisque tout se faisait manuellement.
Dans la fabrication de pièces squelettiques de PPA, l’une des principales sources d’erreurs est reliée au paralléliseur. Un scanneur de table permet d’emblée de réduire de façon magistrale cette source d’erreurs, avec une précision à 5 microns près. À travers des fenêtres de positionnement, la technologie permet non seulement d’identifier les zones de rétention comme telles, mais également de quantifier celles-ci à travers une gradation de couleurs. Elle permet aussi d’obtenir une vision périphérique au niveau des reteneurs indirects et de s’assurer que les rétentions soient parfaitement identifiées. Manuellement, il est impossible de s’approcher d’un tel niveau de précision.
Un autre point très intéressant que cette technologie permet de gagner est la constance, puisque l’ordinateur n’a jamais de mauvaise journée! Il n’est pas sujet à l’inconstance de l’opérateur. Le niveau d’inconstance primaire est relié à l’action humaine. La personne qui cire une prothèse partielle ne cire pas toujours de la même façon, et la personne qui la finit ne finit pas toujours de la même façon.
Quelle est la base ultime d’une PPA? La base d’un châssis ou d’une pièce métallique est son axe d’insertion. Les techniques digitales permettent d’obtenir une grande précision de l’axe d’insertion, et ce, de manière constante et prévisible.
Pour avoir accès à cette technologie et y plonger, il faut avoir le désir de pousser sa pratique un peu plus loin. Jadis, les techniques de prise d’empreintes conventionnelles, sans que l’on puisse imaginer repousser ces limites, restreignaient la qualité des structures produites. Aujourd’hui, les nouvelles techniques nous amènent complètement ailleurs; cette technologie permet d’être extrêmement performant, et la qualité de l’empreinte est très importante.
Y a-t-il un protocole à respecter afin de produire une empreinte et un modèle qui pourra être soumis à un scanneur de table? Un protocole strict, non. Mais une empreinte précise découlant d’une technique sans raccourcis est importante. Plusieurs praticiens utilisent l’alginate, qui est un matériau précis, facile à utiliser, mais qui doit être coulé rapidement comme vous le savez. Le protocole aurait donc l’air de ceci :
- Prise de l’empreinte primaire.
- Fabrication d’un porte-empreinte individuel avec trous aux 1 à 1,5 millimètre afin de s’assurer d’avoir une bonne rétention mécanique et de prévenir le décollement de l’alginate. Prévoir un espaceur régulier de 3 millimètres dans le porte-empreinte afin de s’assurer d’avoir une épaisseur régulière d’alginate. Prévoir aussi l’adhésif.
- Prise de l’empreinte finale de qualité, coulée dans des délais de 20 à 30 minutes maximum. Prévoir un milieu humide afin d’éviter le dessèchement de l’empreinte.
Un modèle précis découlera de cette première étape cruciale et, à partir de ce moment, nous pouvons numériser.
L’acquisition des données
Généralisons et parlons de l’empreinte comme telle. Beaucoup de ressources sont déployées dans le monde afin d’améliorer et de parfaire cette étape essentielle. À cette étape, l’information est reçue en vocabulaire spécifique qu’on appelle un fichier STL (stéréolithographie), type d’extraction de fichiers qui est déjà largement utilisé dans d’autres domaines, dont les domaines de l’automobile et de l’aéronautique. C’est ce fichier qui sera ensuite transporté vers des outils de dessin.
La marche à suivre avec le scanneur de table (par opposition au scanneur intraoral) : prendre votre empreinte, envoyer votre modèle de travail, et le laboratoire numérisera ce modèle. De là est obtenu un fichier STL.
Exemple de modèle numérisé à l’aide d’un scanneur de table.
Le design
Le design constitue ce que nous allons faire des données de l’acquisition, indépendamment du type de restauration (couronne, prothèse partielle, restauration implantoportée).
Design de la pièce squelettique à travers le logiciel de dessin.
La fabrication
Dans le cadre de la fabrication d’une PPA, les données informatiques sont transmises à une unité de fusion du métal qui, dans le cas échéant, est appelée Phenix.
Les scanneurs intrabuccaux
À ce jour, il existe plusieurs types de scanneurs de diverses compagnies, mais simplement dans le but d’en voir les grands principes, voyons un modèle qui se veut très populaire auprès des praticiens.
Le I-Téro
Cet appareil offre aux dentistes, aux denturologistes et aux techniciens en laboratoire un choix ouvert d’options de connexion. Les fichiers du scanneur peuvent être importés dans de nombreux logiciels de CAD-CAM dentaires figurant parmi les leaders du marché : Dental Wings, Amann Girrbach et 3Shape. Pour l’utilisateur, ce choix ouvert donne la liberté de travailler avec un éventail de solutions pour la conception prothétique et les processus de fabrication CAD-CAM. Il existe une vaste gamme d’applications permettant plusieurs options, dont la fabrication de barres et de structures vissées sur implants, en passant par la confection de pièces squelettiques en PPA.
L’utilisation de tels appareils signifie que l’opérateur n’a plus besoin de prendre d’empreinte en bouche, comme les méthodes conventionnelles le prescrivent.
Ces appareils permettent d’éliminer l’étape de la prise d’une empreinte intrabuccale, qui se fera dorénavant de façon entièrement digitale.
L’évolution des appareils fait en sorte qu’il est de plus en plus facile de prendre des empreintes digitales même chez les édentés complets, ce qui permet d’entrevoir des modèles numérisés qui permettent la fabrication de structures pour prothèses implantoportées, et ce, sans même avoir pris d’empreintes conventionnelles.
La modernisation des divers processus utilisés en dentisterie et en denturologie nous amène à nous dépasser en tant que praticiens. La technologie nous force à sortir de notre zone de confort afin de profiter pleinement de la grande précision que ces techniques apportent. Mais la question demeure : êtes-vous prêts à élever votre niveau de connaissance afin de ne pas regarder le train passer?
Nous tenons à remercier le laboratoire Dentachrome de nous avoir exposé en détail les clés du succès pour la numérisation lors d’un cercle d’étude régional de la Société d’Implantologie Dentaire le 15 octobre 2014. Si vous désirez obtenir plus d’informations concernant la technologie et les techniques employées, n’hésitez pas à contacter Dr Éric Caron, directeur général chez Dentachrome, ou monsieur Gilbert Riendeau, responsable du département d’implantologie chez Dentachrome.